Après un petit séjour à Tbilisi, nous nous dirigeons vers les montagnes au nord du pays par la Georgian Military Highway, la route principale qui traverse la Caucase et relie la Russie à la Géorgie. Nous quittons la route principale encombrée de camions pour nous diriger vers la vallée de Truso, connue pour ses sources d’eau minérales. Je ne sais pas pourquoi nous nous étions imaginé que c’était des sources chaudes, mais non, pas du tout, c’est glacé ! Dommage pour le bain, mais les paysages sont néanmoins très beaux. Les sources forment de magnifiques concrétions jaunes et rouges.
Nous sommes bloqués au fond de la vallée par les gardes-frontières qui ferment l’accès à la route menant à l’Ossétie du Sud (accessible uniquement depuis la Russie depuis son indépendance après la guerre avec la Russie en 2008). Nous visitons un ancien village aujourd’hui en ruine, caractérisé, comme ailleurs dans cette région montagneuse de Géorgie, par des maisons-tours en pierres sèches qui servaient à la fois de stockage et d’habitat défensif. Ces villages datent le plus souvent du 10eme siècle et ont souvent été complètement abandonnés dans les années 1950.
Le lendemain, nous allons faire une petite randonnée dans la vallée de Sno. Beau bivouac, belle balade malgré les nombreux touristes venus trekker. On sent que l’activité touristique se développe à vitesse grand V. Les guesthouses en construction fleurissent dans le petit village de Juta qui ne devait comporter que quelques familles d’éleveurs. Un grand hôtel avec sauna trône au milieu du village, c’est la cohue sur le petit parking qui ne peut accueillir qu’une dizaine de véhicules et les croisements sur la mauvaise route qui y mène sont acrobatiques. Un camping et un refuge d’altitude sont construits au début du principal sentier de randonnée, une heure plus loin on trouve une cabane faisant office de café, une autre en construction… Bon, c’était le bon moment pour venir balader mais dans quelques années ce sera totalement insupportable.
Nous décidons ensuite d’aller bivouaquer à côté du monastère de Tsminda Sameba, au-dessus de Kazbegi. Laurent était déjà venu là il y a 7 ans et avait trouvé le lieu magique. A l’époque, il n’y avait personne. Aujourd’hui, c’est pas le Mont Saint Michel mais presque… La piste d’accès est une des plus pourries et des plus fréquentées que nous ayons empruntée jusque-là. Devant le monastère la pelouse est complètement labourée par les véhicules. Il y a évidemment une buvette, un shop, des chiottes… et des centaines de touristes. Nous trouvons quand même une place de bivouac sympa mais nous sommes des douzaines à camper là-haut. Même si le paysage est splendide, l’ambiance n’est pas du tout ce que nous recherchons d’habitude.
Un téléphérique avait été construit du temps de l’URSS pour relier le village au monastère, mais il a été supprimé car à l’indépendance on a considéré que c’était un outrage à la sacralité du lieu. Pas sûr que laisser des centaines de 4x4 puants (dont le nôtre) monter sur cette piste pourrie, labourer la pelouse et polluer les paysages soit une meilleure idée… Mais buisness is buisness, les taxis sont une bonne source de revenus pour les habitants du village.
Un peu dépités, nous fuyons Gergeti pour une région plus sauvage, la vallée de Khevsureti. La route passe un joli col où nous rencontrons Nicolas, un français que nous avions déjà croisé l’an dernier au Tadjikistan et qui vit en Géorgie une bonne partie de l’année. Il est venu faire découvrir la région à sa copine. En fait, il lui fait le coup de la panne car nous les retrouvons quelques kilomètres plus loin avec un pneu crevé, pas de cric et une roue de secours dégonflée… On l’aide à réparer, il nous offre sa provision de tcha-tcha, la grappa locale (à base de marc de raisin)… ouf, ça réchauffe !
La vallée est beaucoup plus sauvage même si le village de Shatili est rempli de nouvelles guesthouses. Les anciennes maisons fortifiées sont en voie de rénovation (et de transformation en guesthouse), mais on peut encore les visiter librement. On se dit qu’on a la chance de venir ici avant que le tourisme ne soit trop développé.
On poursuit la vallée jusqu’à la fin de la route, peu après le petit hameau de Mutso. C’est certainement l’endroit le plus beau et le plus sauvage. Au bout de la vallée, il ne reste plus qu’une seule famille qui vit là en permanence, les conditions de vie sont difficiles et les autres habitants ont préféré partir vivre à Tbilisi. En hiver, la route est évidemment fermée (elle est aussi souvent coupée l’été par les crues des torrents) et le village de Shatilli où ne reste que quelques familles est ravitaillé en hélico une fois par mois.
Une particularité locale est la manière d’inhumer les corps dans des petites maisons en pierre, avec une petite ouverture d’où l’on peut voir les ossements blanchis.
Les Khsevurs sont un peuple particulier qui a vécu séparé des Géorgiens pendant des siècles, jusqu’à ce que les communistes les intègrent de force dans la société dans les années 1950. En 1910, des photos montrent des guerries khesvurs habillés encore en cotte de maille et armés d’épées. L’histoire raconte qu’un groupe de Khesvurs s’est présenté à Tbilisi ainsi en 1915 pour participer à la guerre.
Nous visitons la vallée voisine de Roshka où nous remarquons une nouvelle route en construction afin de désenclaver les petits villages encore accessibles uniquement à pied, puis nous retournons à la civilisation. Ce sont les derniers jours de ce voyage, nous laissons la voiture à Tbilisi jusqu’à l’an prochain et rentrons en avions dans quelques jours. Nous fêtons ça (et mon anniversaire !) dans un château viticole à coté de Tbilisi. Dégustation de vin, piscine, chambre luxueuse de 40m2… la grande classe après 3 mois de camping sauvage !
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